Renseignements généraux

L’insuffisance pancréatique exocrine (IPE) peut être présente chez les patients atteints de diabète de type 1 ou de type 2, mais un type de diabète différent – le type 3c – pourrait aussi être associé à l’IPE. Chez les patients atteints de diabète de type 1 ou de type 2, les tests directs de la fonction pancréatique révèlent une sécrétion d’enzymes et/ou de bicarbonate réduite. Toutefois, dans la plupart des cas, la diminution de la fonction exocrine est légère à modérée, et n’entraîne pas une malabsorption des graisses importante1.

Le diabète de type 3c, aussi appelé pancréatogénique, découle de maladies pancréatiques (notamment la pancréatite, le cancer du pancréas et la fibrose kystique), d’une lésion au pancréas ou d’une résection pancréatique1,2. Tous les patients atteints du diabète de type 3c montrent des signes d’une IPE plus grave que celle observée chez les patients atteints de diabète de type 1 ou de type 22.

Épidémiologie

La prévalence de l’IPE semble être plus élevée chez les patients atteints de diabète de type 1 que chez ceux atteints du diabète de type 2, soit 26 % à 57 % vs 20 % à 36 %, respectivement2. Chez les patients atteints du diabète, le diabète de type 3c représente 5 à 10 % des cas en Occident2 et 15 à 20 % des cas en Inde et en Asie du Sud-Est1.

Causes

L’étiologie du diabète de type 3c comprend la pancréatite chronique (76 %-79 %), le cancer du pancréas (8 %-9 %), l’hémochromatose héréditaire (7 %-8 %), la fibrose kystique (4 %) et l’après résection pancréatique (2 %-3 %)2. Dans tous les cas, l’IPE est liée à des causes diverses. Dans les cas de diabète de type 1 ou de type 2, tout affaiblissement des îlots qui sécrètent de l’insuline peut se répercuter négativement sur la fonction exocrine du pancréas et, par conséquent, causer une IPE. D’autres facteurs peuvent contribuer, notamment l’atrophie pancréatique, la vasculopathie et la neuropathie, qui en s’additionnant réduisent la sécrétion des enzymes digestives. De plus, l'hyperglycémie aiguë peut réduire la capacité sécrétoire exocrine du pancréas1.

Physiopathologie

Le diabète peut être compliqué par un dysfonctionnement pancréatique de nature exocrine pour plusieurs raisons, notamment1 :
  • Dans le cas du diabète de type 1, la destruction auto-immune des îlots pancréatiques endocrines, qui produisent de l’insuline, peut aussi se répercuter sur le pancréas exocrine1;
  • La perte de l’effet trophique de l’insuline sur le pancréas;
  • L’effet suppressif des niveaux élevés de glucagon;
  • Les dommages vasculaires découlant d’une maladie des petits vaisseaux;
  • L’affaiblissement des réflexes entéro-pancréatiques causé par une neuropathie autonomique;
  • L’hyperglycémie aiguë liée au diabète de type 1 et de type 2 peut endommager réversiblement la sécrétion pancréatique exocrine.

On a observé chez des patients diabétiques une réduction de la taille du pancréas et des changements touchant la morphologie et l’histologie du pancréas qui sont attribuables à une atrophie, à une involution adipeuse et à une calcification. L’atrophie est plus prononcée dans le cas du diabète de type 1 que du diabète de type 22.

L’IPE associée au diabète est habituellement d’intensité légère à modérée et n’est pas associée à une malabsorption des graisses manifeste1.

Diabète de type 3c

La physiopathologie du diabète de type 3c est différente de celles des diabètes de types 1 et 2, et rend les patients particulièrement vulnérables à l’hyperglycémie postprandiale. Ses principales caractéristiques pathologiques sont les suivantes1 :

  • Sécrétion insuffisante d’insuline;
  • Sécrétion insuffisante de polypeptide pancréatique (particulièrement depuis la tête du pancréas), qui peut empêcher ou réduire la suppression de la production de glucose hépatique postprandial;
  • Sécrétion insuffisante d’hormones incrétines, lesquelles jouent un rôle important dans la régulation du glucose sanguin postprandial;
  • Sécrétion insuffisante de glucagon à laquelle s’ajoute l’IPE (malabsorption des nutriments) et une sensibilité intacte ou accrue à l’insuline périphérique, qui prédisposent les patients à des épisodes d’hypoglycémie.

CONSTATATION

Environ 51 % des patients atteints du diabète de type 1 présentent une fonction pancréatique exocrine anormale.

Durie P, et al. 201812

Signes et symptômes

L’IPE peut échapper au diagnostic du fait que ses signes et symptômes ressemblent à ceux d’autres maladies gastro-intestinales4.

L’IPE cause une malabsorption et une maldigestion, ce qui entraîne les symptômes suivants1,5 :

Symptômes

  • PERTE DE POIDS
  • DOULEUR ABDOMINALE
  • FATIGUE
  • DIARRHÉE
  • STÉATORRHÉE
  • FLATULENCES

La stéatorrhée se caractérise par des selles graisseuses et nauséabondes, et est généralement la manifestation classique la plus courante de l’IPE. Il arrive qu’elle se manifeste seulement lorsque la maladie a atteint un stade avancé1,6.

La stéatorrhée est relativement courante chez les diabétiques. Cependant, bien souvent, elle n’est pas causée par une insuffisance pancréatique, mais plutôt par une prolifération de bactéries dans l’intestin grêle. La stéatorrhée n’est donc pas nécessairement une caractéristique de l’IPE chez les patients diabétiques1.

Complications

Les complications découlant de la maldigestion et de la malabsorption pourraient avoir progressivement un effet néfaste sur le bien-être d’un patient et se répercuter sur l’évolution de la maladie sous-jacente, en plus d’accroître la morbidité et la mortalité5,7,8. Pour obtenir des renseignements plus complets sur les complications de l’IPE, CLIQUER ICI.

Diagnostic

Diagnostic du diabète de type 3

Des critères ont été proposés pour le diagnostic du diabète de type 3c9. Tous les critères principaux ci-dessous doivent se réunir :

  • Présence d’IPE (selon le dosage de l’élastase-1 fécale monoclonal ou un test direct de la fonction pancréatique);
  • Imagerie des pathologies du pancréas (échographie endoscopique, IRM, TDM);
  • Absence de marqueurs des maladies auto-immunes associés au diabète sucré de type 1.

Critères secondaires :

  • Fonction déficiente des cellules bêta (p. ex., HOMA-B, ratio peptide C/glucose);
  • Pas de résistance excessive à l’insuline (p. ex., HOMA-IR);
  • Sécrétion insuffisante d’incrétine (p. ex., GLP-1, polypeptide pancréatique);
  • Faibles niveaux sériques de vitamines liposolubles (vitamines A, D, E et K).
Diagnostic de l’IPE chez les patients diabétiques

La maldigestion des graisses chez les patients diabétiques peut se répercuter sur le métabolisme du glucose, ce qui peut faire varier le contrôle glycémique3. Plusieurs méthodes permettent de diagnostiquer l’IPE, dont les méthodes indirectes comme le dosage de l’élastase-1 fécale qui sont les plus souvent utilisées en milieu clinique1.

Le quart des patients atteints de diabète de type 1 ou de type 2 présentent des symptômes gastro-intestinaux, notamment la stéatorrhée. Ces symptômes ne sont donc pas fiables pour poser un diagnostic d’IPE chez les diabétiques10. Les personnes atteintes de diabète qui présentent des symptômes d’IPE devraient faire mesurer leur taux d'E-1F. Si leur taux d'E-1F est trop bas, il faut procéder à des examens plus poussés comme une TDM ou une échographie endoscopique du pancréas pour confirmer une IPE3.

Pour de plus amples renseignements sur le diagnostic de l’IPE, CLIQUER ICI.

Traitement

On utilise habituellement les mêmes agents pharmacologiques pour traiter le diabète de type 3c et le diabète de type 29. En ce qui a trait à l’IPE, la plupart des affections qui mènent au diabète de type 3c sont associés à l’IPE et il pourrait être avantageux alors d’avoir recours au traitement de substitution d’enzymes pancréatiques (TSEP), soit le traitement usuel de l’IPE1,2.

Le TSEP a des répercussions positives sur les symptômes de l’IPE chez les patients diabétiques, et le nombre limité d’études comptant un petit nombre de patients montre que le contrôle glycémique pourrait aussi être bénéfique10. En plus d’augmenter la sécrétion d’insuline et d’améliorer ainsi le taux de glucose postprandial, le TSEP pourraient réduire la fréquence des épisodes d’hypoglycémie10.

Le TSEP (pancrélipase) administré pendant six mois peut améliorer le taux de glucose plasmatique postprandial et le taux d'hémoglobine glycosylée chez les patients diabétiques qui souffrent d’une pancréatite chronique11.

Pour en savoir plus sur le traitement de l’IPE par le TSEP en général, la posologie du TSEP et d’autres aspects de la prise en charge de l’IPE, CLIQUER ICI.

Références

  1. Smith RC, Smith SF, Wilson J, Pearce C, Wray N, Vo R, et al. Australasian guidelines for the management of pancreatic exocrine insufficiency. Australasian Pancreatic Club, octobre 2015. p. 1-122.
  2. Singh VK, Haupt ME, Geller DE, Hall JA, Quintana Diez PM. Less common etiologies of exocrine pancreatic insufficiency. World J Gastroenterol. 2017;23(39):7059-7076.
  3. Cummings M. Pancreatic exocrine insufficiency in type 1 and type 2 diabetes – more common than you think? Journal of Diabetes Nursing. 2014;18:320-323.
  4. Leeds JS, Oppong K, Sanders DS. The role of fecal elastase-1 in detecting exocrine pancreatic disease. Nat Rev Gastroenterol Hepatol. 2011;8:405-15.
  5. Sikkens EC, Cahen DL, van Eijck C, Kuipers EJ, Bruno MJ. Patients with exocrine insufficiency due to chronic pancreatitis are undertreated: a Dutch national survey. Pancreatology. 2012;12(1):71-73.
  6. Domínguez-Muñoz JE. Pancreatic exocrine insufficiency: diagnosis and treatment. J Gastroenterol Hepatol. 2011;26(Suppl 2):12-16.
  7. Ockenga J. Importance of nutritional management in diseases with exocrine pancreatic insufficiency. HPB (Oxford). 2009;11(Suppl 3):11-15.
  8. Fitzsimmons D, Kahl S, Butturini G, van Wyk M, Bornman P, Bassi C, Malfertheiner P, George SL, Johnson CD. Symptoms and quality of life in chronic pancreatitis assessed by structured interview and the EORTC QLQ-C30 and QLQ-PAN26. Am J Gastroenterol. 2005;100(4):918-926.
  9. Ewald N, Bretzel RG. Diabetes mellitus secondary to pancreatic diseases (Type 3c): are we neglecting an important disease? Eur J Intern Med. 2013;24(3):203-6.
  10. Cummings MH, Chong L, Hunter V, Kar PS, Meeking DR, Cranston ICP. Gastrointestinal symptoms and pancreatic exocrine insufficiency in type 1 and type 2 diabetes. Pract Diabetes. 2015;32(2):54-8.
  11. Mohan V et al. Oral pancreatic enzyme therapy in the control of diabetes mellitus in topical calculous pancreatitis. Int J of Panc, 1998; 4 (1), 19-22
  12. Durie P, Baillargeon JD, Bouchard S, et al. Diagnosis and management of pancreatic exocrine insufficiency (PEI) in primary care: consensus guidance of a Canadian expert panel. Curr Med Res Opin. janv. 2018;34(1):25-33.